La Côte d’Ivoire, vitrine de la croissance en Afrique de l’Ouest, affiche un développement des infrastructures impressionnants. Routes flambant neuves, ponts majestueux, réseau électrique en expansion, fibre optique en déploiement : les chantiers se multiplient. Pourtant, derrière cette vitrine de modernité, une réalité plus contrastée, voire inquiétante, se dessine.

Des infrastructures à deux vitesses
Le développement des infrastructures ivoiriennes semble obéir à une logique à deux vitesses. D’un côté, les grands centres urbains, Abidjan en tête, bénéficient d’investissements massifs. Des projets phares, tels que le 4ᵉ pont d’Abidjan ou le métro, captent l’essentiel des ressources, laissant les zones rurales en marge.
Cette concentration des investissements accentue les inégalités territoriales. Dans les campagnes, où vie une grande partie de la population, les infrastructures de base sont insuffisantes : routes dégradées, accès limité à l’électricité et à l’eau potable, couverture numérique déficiente. Ce déséquilibre freine le développement économique local et alimente l’exode rural.
Qualité et durabilité en question
Au-delà de la quantité, la qualité et la durabilité des infrastructures posent problème. Certains projets, réalisés dans l’urgence, présentent des malfaçons et nécessitent des réparations coûteuses. L’absence d’entretien régulier accélère la dégradation des infrastructures, écourtant leur durée de vie et augmentant les coûts à long terme.
L’impact environnemental des grands projets est également préoccupant. Une vision à court terme conduit à négliger des enjeux majeurs tels que la déforestation, la pollution et la destruction des écosystèmes.
Une transformation numérique en demi-teinte
Un récent rapport de Bloomfield Intelligence évalue les progrès de la transformation numérique de l’administration publique ivoirienne en 2025. L’analyse révèle un tableau contrasté, oscillant entre avancées encourageantes et défis persistants.

L’un des points saillants du rapport est la stabilité des notes attribuées, tant pour 2025 que pour les perspectives à court et long terme. À l’exception d’une légère amélioration attendue des performances économiques, les indicateurs stagnent. Cette absence de progression significative interroge sur l’efficacité des politiques mises en œuvre et la capacité du pays à accélérer sa transition numérique.
Un récent rapport de Bloomfield Intelligence évalue les progrès de la transformation numérique de l’administration publique ivoirienne en 2025. L’analyse révèle un tableau contrasté, oscillant entre avancées encourageantes et défis persistants.
Gouvernance : des efforts insuffisants ?
La gouvernance, pilier essentiel de toute transformation, obtient une note de 6,5, inchangée par rapport aux prévisions. Cette stabilité peut être perçue comme une difficulté à mettre en œuvre des réformes profondes. Des interrogations subsistent sur la transparence, l’efficacité des institutions et la lutte contre la corruption.
Cadre réglementaire : un frein à l’innovation ?
Avec une note de 5,5, le cadre réglementaire et juridique demeure un point faible. Bien que les perspectives soient stables, cela indique que des obstacles juridiques et administratifs persistent, freinant le développement du secteur numérique. Des réformes sont-elles envisagées pour encourager l’innovation et l’investissement ?
Également notée 5,5, la structure du secteur semble manquer de dynamisme. Cette stagnation peut s’expliquer par un manque de concurrence, une concentration excessive du marché ou des difficultés à attirer les investissements. Des mesures sont-elles prévues pour favoriser l’émergence de nouvelles entreprises et stimuler la compétitivité ?
Performances économiques :une lueur d’espoir ?
Seul indicateur en amélioration, la performance économique devrait progresser légèrement, passant de 6,5 à 7. Cette hausse est-elle le résultat d’investissements stratégiques ou d’un effet d’entraînement lié à d’autres secteurs ? Une analyse approfondie des moteurs de cette croissance serait nécessaire.
Note globale : un potentiel inexploité
Avec une note globale de 6,0, en légère hausse à 6,3, la Côte d’Ivoire peine à concrétiser ses ambitions en matière de transformation numérique. Ce bilan en demi-teinte appelle à une remise en question des stratégies actuelles et à une accélération des réformes.
L’évaluation de Bloomfield Intelligence doit être perçue comme une alerte. La Côte d’Ivoire doit intensifier ses efforts pour lever les obstacles à sa transformation numérique. Cela implique des réformes ambitieuses en matière de gouvernance, de réglementation et de structure du secteur, ainsi que des investissements ciblés dans les infrastructures et le développement des compétences.
Défis et perspectives
Pour un développement harmonieux et durable, la Côte d’Ivoire doit relever plusieurs défis majeurs :
- Rééquilibrer les investissements : Accorder une attention accrue aux zones rurales en développant les infrastructures de base et en favorisant le développement local.
- Améliorer la qualité et la durabilité : Renforcer les contrôles techniques, assurer un entretien régulier et intégrer les préoccupations environnementales dans la planification des projets.
- Favoriser la participation citoyenne : Impliquer les populations locales dans la conception et la mise en œuvre des projets afin de mieux répondre à leurs besoins et garantir l’appropriation des infrastructures.
- Lutter contre la corruption : Assurer la transparence et la bonne gouvernance dans la gestion des fonds alloués aux infrastructures pour éviter détournements et gaspillages.
Le développement des infrastructures est un levier essentiel de la croissance économique et du bien-être social. Cependant, pour que la Côte d’Ivoire devienne un véritable modèle de développement, elle doit impérativement corriger les déséquilibres et les faiblesses de son approche actuelle.
Ndlr : En pièce jointe, le rapport de Bloomfield Intelligence.
_Paul-Axel KOUAME